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Aznavour, "un monsieur qui m’a toujours enchanté"

Dans les années soixante Hugues Vassal, photographe officiel d’Édith Piaf a couvert en exclusivité les grands moments de la vie de Charles Aznavour. Jusqu’à partager de vrais moments d’intimité.

Vous souvenez-vous de votre première rencontre avec Charles Aznavour ? « Oui, c’était chez Édith Piaf, au 67 bis boulevard Lannes. Il a été son secrétaire particulier, son homme à tout faire, en vérité, pendant cinq ans et c’est lors d’un de mes rendez-vous avec Édith que je l’ai rencontré. »

Les temps étaient difficiles pour lui, à ce moment-là… « Il avait faim ! Il avait un duo avec un pianiste qui s’appelait Pierre Roche et ils ne faisaient que des bides. Il était tellement fauché qu’il récupérait des vieux draps de l’armée pour se faire tailler des costumes. Édith savait repérer les gens qui avaient un potentiel, du talent, du caractère et elle les aidait. Il la suivait partout dans ses tournées, il portait ses valises et la subissait, comme tout le monde autour d’elle. Il fallait accepter ça, le comprendre, pour rester auprès d’elle. En travaillant pour Édith, on n’était pas payé très cher, mais on mangeait ! Et lui n’a jamais oublié ce qu’elle avait fait pour lui. Il était près d’elle quand elle a été malade et je me souviens de l’avoir vu effondré à la sortie de l’appartement, au moment de sa mort. C’était un enfant de la balle, Charles. Ce n’était pas le genre à abandonner les gens du métier. »

Comment est-il passé de cette bohème au succès que nous connaissons ? « Tout à changé avec Je m’voyais déjà, qui a été son premier très gros succès. Avec l’argent qu’il a gagné avec ce tube, il a décidé de louer le Canergie Hall, à New York. Et il l’a rempli. Il a fait un triomphe là-bas. Mais il n’avait pas oublié les années noires où l’Amérique, comme la France, se refusait à lui. Alors, pour fêter le succès, il nous a tous emmenés manger ce qu’il considérait comme le meilleur pastrami de la ville. En fait, il était assez quelconque, mais c’était dans ce restaurant qu’il mangeait à ses débuts et il ne l’avait pas oublié. »

Vous qui l’avez connu avant la gloire, comment expliquez-vous son immense succès ?

« Il était d’une énorme sensibilité et d’un professionnalisme absolu. Et puis, il savait apprendre. Charles, par exemple, a su prendre et adapter pour lui les belles idées d’Édith. Quand il jette son mouchoir dans le rond de lumière à la fin de La Bohème, il reprend, en fait le geste de Piaf en terminant Les Amants d’un jour où elle jetait son verre par terre. »

De quoi parliez-vous quand vous le suiviez en tournée ou quand vous alliez passer une journée chez lui ?

« On parlait beaucoup de lui, de sa carrière, de son métier. Il avait un côté un peu mégalo, mais toujours attachant. C’est un monsieur qui m’a toujours enchanté. Quand on parlait avec lui, c’était un peu comme avec Brel : on discutait spiritualité, humanisme, mais d’une manière très profonde. Il était aussi très malheureux de son Arménie qui souffrait et il s’en est beaucoup occupé. »

Vous l’avez revu, assez récemment, comment cela s’est passé ? « Quand je l’ai revu il y a trois ans, au moment d’un concert au Palais des Sport à Paris, nous n’avions plus eu de contact depuis cinquante ans. Ce soir-là, je lui avais apporté quelques photos de la naissance de son fils, de son mariage avec Ulla. Je lui avais fait un petit album. Et, en le recevant, il avait les larmes aux yeux et il m’a pris la main en tremblant. J’en ai été très ému aussi. »

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